Voici un site que mes confrères marchois et limousins ne m’en voudront pas, je crois, de leur emprunter le temps d’un article. Si la petite abbaye cistercienne de Prébenoît dans la Creuse, est bien située dans le diocèse de Limoges, elle fait partie de ces monastères qui ont livré des informations de grande utilité pour mes recherches doctorales.
Je ne connaissais en fait de Prébenoît que la cote H 528 des Archives départementales de la Creuse et les actes antérieurs au XIVe siècle que j’avais dépouillé pour mon enquête anthroponymique. J’ai eu l’occasion, cet automne, de profiter d’un bel après-midi pour aller découvrir les ruines de cette ancienne abbaye de moines blancs.
Je n’ai pas tenu compte des donateurs marchois qui ont constitué le temporel de Prébenoît, pour me concentrer sur une grande famille berrichonne ayant compté parmi ses principaux bienfaiteurs aux XIIe et XIIIe siècle.
Dès 1140, la puissante maison de Déols, première seigneurie berrichonne de l’époque par son étendue territoriale, participe à la fondation du monastère. D’autres établissements religieux du diocèse limousin profitent de leurs libéralités. Très vite, c’est une branche cadette de la seigneurie de Châteauroux, la maison de Boussac et Châteaumeillant, qui assure, avec d’autres familles féodales locales, la protection des Cisterciens de Prébenoît. Il n’est pas interdit de supposer que quelques uns de ses membres ont pu être inhumés sur place.
La visite du site, en grande partie ruiné, mais qui reste largement lisible, montre que Prébenoît fut un cloître comparable aux établissements cisterciens du sud du diocèse de Bourges (Bussière, les Pierres, la Colombe, Varennes). De taille moyenne, cette fondation est en harmonie, comme ces consœurs citées précédemment, avec un terroir faiblement peuplé et une petite féodalité rurale incapable de lui fournir les fonds nécessaires pour la construction d’un sanctuaire qui puisse rivaliser avec Noirlac, La Prée, Bellaigue ou Obazine. La modicité des infrastructures n’était pas synonyme d’un manque de rayonnement spirituel, que je laisse à mes collègues marchois le soin d’évaluer en fonction de leur connaissance du terrain.
Sur place, on retrouve facilement plusieurs époques de construction, comme dans d’autres abbayes cisterciennes du grand Centre: ruines de l’abbatiale romane, vestiges de fortifications tardives contemporaines de la Guerre de 100 ans, hôtel abbatial post-médiéval, en partie construit avec des pierres de réemploi du cloître disparu et des dalles funéraires.
Prébenoît, sauf erreur de ma part, est un bien communal qui appartient à la municipalité de Betête. Contrairement à d’autres sites médiévaux, l’endroit est visitable tout au long de l’année, grâce à des rendez-vous mensuels proposés par des affichettes disposées sur place, une initiative rare et bienvenue qu’il convient de saluer et de promouvoir!
© Olivier Trotignon 2014