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19 janvier 2010 2 19 /01 /janvier /2010 14:56

croco

Peu habitué à travailler sur des sujets absents des sources documentaires et disparus sans laisser de traces tangibles de leur existence, j’aimerais pourtant évoquer ici une tradition cultuelle relevée à plusieurs reprises par des enquêtes faites par les chercheurs en traditions populaires et qui a été totalement effacée du patrimoine spirituel régional. Selon certaines mémoires orales, quelques églises en Berry et Bourbonnais auraient abrité, jusqu’à ce que l’usure les fasse jeter aux orties ou que certains nouveaux curés leur aient préféré quelque statue de plâtre multicolore, des momies de crocodiles, peut-être d’époque pharaonique. Ramenées par des pèlerins ou des croisés de retour de Terre sainte, ces dépouilles desséchées auraient été achetées par des voyageurs occidentaux, lors d’étapes à Damiette, port du delta du Nil, à des marchands égyptiens vendant une marchandise pillée dans des tombeaux antiques. Nos chevaliers, ignorants de la nature originelle des animaux qu’on leur proposait, les auraient pris pour de petits dragons et les auraient ramenés dans leur paroisse d’origine comme trophée de leur voyage, les vouant peut-être au culte de saints combattant le Mal tels saint Georges ou saint Michel. Si cette interprétation est véridique, il est certain que l’exotisme de leur aspect pouvait avoir de quoi marquer les imaginations rustiques et que ces momies ont pu jouer un rôle de reliques dans certains sanctuaires.

Même s’il est impossible de faire un recensement précis des croisés berrichons, les textes citent pour chaque grand mouvement de croisade de un à plusieurs participants nés dans la noblesse régionale, dont plusieurs sont revenus saufs et espérons le pour eux, sains, de leur voyage en Orient. Que certains de ces hommes aient songé à charger dans leurs bagages des souvenirs encombrants mais légers de leurs pérégrinations outre-mer n’aurait rien eu rien d’extravagant.

On ne peut s’empêcher de regretter la complète disparition de tous ces témoignages d’une foi certes assez éloignée de l’orthodoxie de la pensée vaticane, mais qui, analysés avec les moyens scientifiques dont nous disposons aujourd’hui, auraient représenté un trésor d’enseignements pour les historiens contemporains.


dragon-Levroux


Le crocodile illustrant cet article n’est pas berrichon, mais languedocien et a été photographié il y a plus d’un quart de siècle dans l’église de Saint-Bertrand-de Comminges, dans les Hautes-Pyrénées. 

Peut-être, comme ce fut le cas pour l’article dédié aux saints Vit et Greluchon, avez vous vous même recueilli des témoignages ou des traditions orales en relation avec ces “dragons” africains. Vos ajouts et remarques sont d’ores et déjà les bienvenus.

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12 janvier 2010 2 12 /01 /janvier /2010 18:48

Levroux-voute
Voici encore un lieu incontournable du patrimoine religieux régional qui mérite une visite attentive, tant la richesse des œuvres qu’on peut y découvrir dépasse la plupart des autres monuments de la plaine et du bocage berrichon.

levroux-portail 

La collégiale Saint-Sylvain de Levroux fut bâtie au XIIIe siècle sur l’emplacement d’une église primitive. Si son aspect extérieur, vu de loin, est assez banal, la finesse de l’exécution que les bâtisseurs médiévaux ont déployée pour la réaliser surprend et fascine dès le premier contact et, irrésistiblement, rappelle sa grande voisine Saint-Étienne de Bourges. Comme dans la cathédrale berruyère, le portail est orné d’une représentation du Jugement dernier, malheureusement très dégradée lors des Guerres de religion. La silhouette des démons, la gueule animale de l’Enfer, les morts sortant du tombeau évoquent le tympan du portail central de la cathédrale de Bourges. La comparaison de s’arrête pas là. Dans la nef, on aperçoit un triforium en trompe-l’œil (les ouvertures de Levroux ne débouchent pas sur une galerie), comme il en existe un vrai dans la structure de la cathédrale Saint-Étienne.

levroux-tombeaux 
levroux-enfer 

L’abside, travaillée dans un calcaire blanc et lumineux, est superbe. La clé de voûte représente un Christ en majesté d’une facture rare dans la région.
Levroux-cle-de-voute 

Visiblement, les chanoines de Levroux, détenteurs de reliques réputées pour la guérison de certaines maladies de peau défigurantes, ont suivi les progrès du chantier de la cathédrale de la cité royale voisine et s’en sont inspirés avec des moyens considérablement plus limités, et ont rompu avec la tradition romane en offrant à la petite ville propriété de la seigneurie de Châteauroux un lieu de culte lumineux, selon les préceptes du temps, et qui n’avait en rien à rougir de la comparaison avec son grand voisin berruyer.

Une rapide recherche sur internet montre que cette collégiale est injustement méconnue des historien de l’Art et que sa scène de Jugement dernier est passée aux oubliettes de la culture savante.

Je recommande donc à mes lecteurs de réserver un après-midi de beau temps pour venir faire la découverte d’un monument rare et remarquable à tous points de vue. On soulignera que la municipalité de Levroux a mis à disposition des visiteurs un éclairage puissant à volonté, et que les parties les plus spectaculaires du monuments ne restent pas dans l’ombre, comme c’est si souvent le cas ailleurs.

Nous consacrerons ultérieurement un article aux stalles de la collégiale et à leurs miséricordes, présentant de nombreuses similitudes avec celles de l’abbaye de Chezal-Benoît, dans le Cher.

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26 novembre 2009 4 26 /11 /novembre /2009 09:12


 La petite chapelle gothique de Saint-Sylvain, sur la commune de la Celle-Bruère, dans le département du Cher est peut-être le monument régional sur lequel on m’a posé le plus de questions depuis deux décennies tant sa réputation auprès d’une certaine frange de la population qui raffole d’histoires de messes noires et de monstres nocturnes de diverses natures est solidement établie.

A l’origine, la chapelle de Saint-Sylvain est presque transparente dans la documentation médiévale. Bâtie à la fin du Moyen-âge pour abriter une relique de son saint éponyme, Saint-Sylvain devient un lieu de pèlerinage qui se déroule autour du prétendu tombeau de saint Sylvain. Ce joli tombeau-reliquaire malheureusement dégradé à la Révolution demeure visible sur place jusqu’à la fin du XIXe siècle, époque à laquelle la chapelle, menaçant ruine, interpelle l’historien Buhot de Kersers, qui appelle de ses vœux le sauvetage du monument. La décrépitude de l’endroit incite à déménager le tombeau pour le déposer dans l’église paroissiale de la Celle, où il peut être étudié aujourd’hui.

La restauration partielle de la chapelle, entreprise par son propriétaire, permet, il y a quelques années, de mettre le bâtiment hors d’eau et de ne pas lui faire subir le triste sort du prieuré de Souage, à quelques kilomètres de là.

L’histoire pourrait s’arrêter la simple évocation d’un petit patrimoine religieux pouvant intéresser les érudits et les curieux s’il n’y avait eu ces corps de ferme, délaissés comme tant d’autres, voisins de la chapelle, qui ont été confondus dans l’imaginaire de beaucoup de gens avec un village abandonné. Les rumeurs ont fait leur chemin et Saint-Sylvain est devenu pour nombre de fêtards un lieu où apparaîtraient pêle-mêle la “Dame blanche”, des revenants et autres entités ectoplasmiques. Tout ce salmigondis de superstitions a contribué à la détérioration du site par malveillance ou par ignorance, et les dégradations constatées sur place, de même nature que celles qu’on déplore à Bléron, ont motivé une interdiction d’accès au site, regrettable pour l’historien de l’Art, mais dont on ne peut blâmer le propriétaire. Les photos qui illustrent cet article sont des vieilles diapositives prises lorsque le site était encore accessible, et scannées pour l’occasion.

Il est très difficile d’évaluer depuis la fin du XVe siècle la fréquentation de ce lieu, complémentaire de l’église Saint-Sylvain de Levroux, connu des pèlerins pour procurer un soulagement contre le “feu de saint Sylvain”, sorte d’érysipéle contre lequel la médecine avait alors peu de remèdes à proposer. Depuis, Saint-Sylvain est victime de sa mauvaise réputation désolante pour des esprits cartésiens et c’est à nous tous, curieux du Patrimoine ou historiens confirmés, de contribuer, en combattant ce flot d’inepties, à la sauvegarde de ce petit monument.

 

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26 octobre 2009 1 26 /10 /octobre /2009 08:43



C’est à titre de mémoire que nous rappelons ici l’existence de la petite église romane de Nohant, à quelques pas de la demeure de George Sand.

Ce bâtiment est d’un modèle très simple bien représentatif des petites églises de campagne berrichonnes. De petite taille, sobrement ornée, elle présente cependant quelques particularités qui méritent l’attention. Ses piliers intérieurs, surdimensionnés et renforcés partiellement par un habillage octogonal, montrent soit que les projets étaient plus ambitieux que la réalisation finale -d’autres chapelles ont connu le même destin- soit  que des désordres de construction ont affecté l’ensemble.

Il est à signaler que quelques fresques de la fin du Moyen-âge sont encore visibles sur place, sans commune mesure avec les peintures de l’église voisine de Vic, bien entendu.

Nohant n’est pas un lieu indispensable dans l’étude de l’architecture sacrée en Berry, mais le visiteur y trouvera une atmosphère préservée, près du château de la Dame de Nohant, qui a elle seule mérite qu’on s’y arrête quelques instants. 


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26 octobre 2009 1 26 /10 /octobre /2009 08:37



Les médiévistes voudront bien me pardonner d’enfoncer, d’une certaine manière, une porte ouverte en présentant les peintures romanes de l’église de Vic, dans l’Indre. Même s’il est évident que leur notoriété est immense, il se trouve encore de nombreux habitants de la région qui fréquentent ce blog en quête de thèmes de promenade et  lecteurs d’outre-mer et des pays étrangers qui n’ont jamais passé la porte de ce monument, si bien qu’il ne pas pas semblé inintéressant d’en rappeler l’existence.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce chef-d’œuvre d’Art roman n’est pas un lieu de grande consommation touristique. Légèrement à l’écart de la route La Châtre-Montluçon, dans le petit hameau de Vic, simplement évoqué par une signalétique discrète, l’église Saint-Martin de Vic est injustement méconnue.

Extérieurement, le sanctuaire présente assez peu d’intérêt, même si son insertion dans un groupe de maisons traditionnelles mérite le coup d’œil. C’est à l’intérieur que se développe sur les murs de la nef et du chœur un remarquable ensemble de fresques qui compte parmi les plus importantes de tout le Centre-Ouest. Longtemps invisibles derrière un badigeon moderne, les peintures ont été restaurées et disposent d’un éclairage automatique qui les met en valeur.

 

N’étant pas historien de l’Art, je n’ai aucune qualité pour gloser sur les styles et les pigments, mais je tiens à souligner le parallèle qui existe entre ce lieu de culte, presque banal, et l’existence à quelques kilomètres de l’une des plus importantes seigneuries médiévale de la Vallée noire. Il est en effet probable de voir dans l’existence des fresques de Vic l’ombre des seigneurs de Saint-Chartier et en particulier Adalard Guillebaud, dont j’évoquai la personnalité dans un article antérieur. N’ayant pu reconnaître sur place aucune autre autorité laïque capable d’évergétisme, on peu supposer qu’un seigneur de Saint-Chartier, Adalard ou un de ses semblables, a pris en charge les frais d’ornementation du sanctuaire de Vic comme nous avions déjà souligné le rapprochement d’une autre église ornées de fresques romanes, en l’occurrence celle de Chalivoy-Milon, dans le Cher, avec une autre puissante seigneurie locale, celle de Charenton.

 

Reste à répondre à une question: Vic est-elle un cas splendide et isolé, ou est-elle l’illustration de ce que les croyants pouvaient contempler dans tous les lieux de culte des alentours de Saint-Chartier? On sait que des traces de fresques ne sont pas exceptionnelles dans les églises de campagne et il se pourrait bien -mais le conditionnel reste de rigueur- que le sanctuaire de Nohant-Vic soit plus conforme à la réalité médiévale que ces chapelles aux murs monochromes comme on en rencontre un peu partout en France.

 

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10 octobre 2009 6 10 /10 /octobre /2009 13:19



Conseiller aux amateurs de patrimoine médiéval d’aller visiter l’église de Neuvy-Saint-Sépulchre peut paraître superflu tant la réputation de ce monument dépasse le cadre régional. Bâtie dans une région en marge des grands circuits touristiques, elle demeure néanmoins méconnue d’un grand nombre de visiteurs, aussi me permets-je d’orienter la curiosité des lecteurs de ce blog vers un monument dont l’originalité frappe au premier contact visuel.

Échappant au plan cruciforme universellement répandu dans les Pays du Centre, les architectes de Neuvy ont appuyé la nef de l’église sur une rotonde de grandes dimensions recopiant, de l’avœu même de ses fondateurs, la forme de l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Guillaume Godel, moine de Saint-Martial de Limoges, rapporte ainsi dans ses chroniques qu’en 1042, le seigneur Eudes de Déols assista, en compagnie de Boson de Cluis, à la fondation de l’église Saint-Jacques “ad formam S. Sepulchrii Yerosolimitani”.

C’est un autre membre de la famille de Déols, le cardinal Eudes de Châteauroux qui fait envoyer sur place en 1257 la relique du Précieux Sang et un fragment du Saint-Sépulchre qui deviennent l’objet d’un pèlerinage dont nous peinons à mesurer la popularité aux temps médiévaux et modernes.

Je laisse aux visiteurs le soin de collecter tous les détails sur les mensurations de l’édifice, parfaitement détaillées par des érudits dont les travaux sont accessibles avec n’importe quel moteur de recherche.

L’unicité de Neuvy, pourtant proclamée par la signalétique municipale dès l’entrée du village paraît cependant à recevoir avec précautions. Quimperlé, en Bretagne, se distingue aussi par une très belle rotonde dans son église Sainte-Croix et les ruines de Lanleff, dans la même région, montrent que les contemporains bretons des seigneurs de Déols et de Cluis avaient aussi ramené de leurs pèlerinages en Terre Sainte l’inspiration nécessaire pour élever leurs propres copies du Saint Sépulcre. Des fouilles récentes à Parthenay, en Poitou, ont révélé les fondations d’un monument de même inspiration.

 

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26 septembre 2009 6 26 /09 /septembre /2009 23:30


Voici un monument qui devrait retenir l’attention de tous les amateurs et spécialistes du costume médiéval: dans la petite église de Venesmes, non loin de Châteauneuf-sur-Cher, est visible une très belle dalle funéraire représentant un chevalier en armes. L’homme est tête nue, habillé de sa cotte de mailles et les reins ceints d’une ceinture sur laquelle est pendue son épée. Ses mains sont jointes en position de prière et ses pieds reposent sur un chien. Un écu portant ses armoiries est gravé à sa droite. L’inscription funéraire est difficile à lire et on peine à identifier le nom de défunt. On s’accordera à reconnaître là une plate-tombe d’une exceptionnelle qualité, à la fois par la finesse du travail du lapicide que par l’excellent état de conservation de l’ensemble. Déposée dans un enfeu dans le transept de l’église, la pierre a été protégée par la voûte et n’a subit aucune dégradation. N’ayant pu passer assez de temps sur place pour travailler sur l’inscription, je ferai confiance aux historiens de l’art qui ont daté cette dalle du début du XIVe siècle et ont identifié le chevalier gisant dans cette tombe comme l’un des propriétaires de la petite forteresse d’Aigue-Morte, à quelques kilomètres au sud du bourg de Venesmes. Le blason, hélas, est un dessin très banal -on connaît plus de 2000 familles ayant un lion comme armoiries en France à cette époque- et ne donne aucune indication précise sur l’origine familiale du chevalier.


Cette tombe nous rappelle une pratique qui devient de plus en plus courante en Berry au cours du Moyen-âge et de la Renaissance. Alors que la haute aristocratie régionale avait pris l’habitude, dès la fin du Xe siècle, de se faire inhumer dans les cimetières des abbayes et prieurés qu’elle protégeait, la petite noblesse rurale, pas assez fortunée pour obtenir ce privilège, a souvent choisi l’église de sa paroisse comme dernière demeure. On connaît ainsi quelques testaments qui permettent de mesurer l’importance et l’homogénéité de cette coutume, qui gagne parfois la haute aristocratie. Le seigneur d’Huriel, dans l’Allier, s’est, par exemple, fait inhumer dans une des églises de cette ville après sa mort à la bataille de Poitiers alors que les anciens seigneurs du lieu avaient au XIe siècle choisi le cimetière du prieuré bénédictin de la Chapelaude pour abriter leur nécropole familiale. Pour le confort des visiteurs, la petite commune de Venesmes a fait l’effort rare d’installer un éclairage à discrétion dans le plafond de l’enfeu, qui permet de prendre des photographies sans flash et évite une surexposition qui liserait tous les détails de la gravure. Cette initiative rare doit être saluée. Comme beaucoup de monuments ruraux, l’église est souvent fermée et la plate-tombe inaccessible. Les futures journées du Patrimoine seront donc pour beaucoup la meilleure occasion de venir admirer cet ensemble rare qui mérite vraiment la visite.


enfeu - transept de l'église de Venesmes 

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2 septembre 2009 3 02 /09 /septembre /2009 10:17


C’est dans la plaine au sud de Bourges, non loin du cours de l’Auron, que s’élèvent les restes de l’ancienne abbaye de Plaimpied, ayant accueilli vers la fin du XIe siècle des chanoines sous la règle de Saint-Augustin. Le terme de “restes” n’est pas synonyme dans ce cas de “ruines”, mais cette abbatiale, très plaisante à visiter et parfaitement entretenue, ne donne qu’une vision tronquée de son état à la période médiévale. Comme d’autres monuments religieux de la région, elle a été victimes de diverses déprédations commises à l’époque moderne, pendant les conflits religieux, et elle a perdu la voûte de sa nef et sa façade. Leur remise en état a permis de rendre au culte et à la visite ce très intéressant exemple d’architecture romane.

 

Comme pour beaucoup d’autres bâtiments de la région de Bourges, les sculpteurs qui ont orné Plaimpied ont disposé comme matière d’œuvre d’un calcaire dur au grain très fin, qui leur a permis de soigner le trait des chapiteaux de l’abbatiale. C’est également dans cette roche qu’ont été réalisés le gisant de l’archevêque de Bourges Richard, second du nom et plusieurs inscriptions funéraires de chanoines enterrés, comme l’archevêque, dans le sol de l’abbaye.

 

C’est surtout dans le sous-sol et la crypte, dont les entrées sont si discrètes qu’elles échappent parfois à l’attention des visiteurs que les lecteurs de ce blog trouveront l’une des particularités les plus remarquables de l’édifice. La chapelle souterraine est en très bon état de conservation et dispose d’un éclairage qui en permet la découverte. Toutefois, se munir d’une lampe de poche peut se révéler très utile, ne serait-ce que pour apprécier toute la finesse des détails des sculptures du chœur.

 

Le médiéviste regrettera que les archives de Plaimpied aient été si malmenées que presque tout a disparu, nous empêchant de mesurer l’importance réelle de ce monastère. Il reste cependant quelques chartes aux Archives départementales du Cher dans la série H. supplément cotées 58 H, dont un très bel acte de 1137. 

Je rappellerai que le prieuré d’Allichamps, près de Bruère, dépendait de Plaimpied, et que la distance entre les deux édifices permet leur visite en une seule demi-journée.

 

 

 

Abbey Plaimpied and crypt

abbey Plaimpied und krypta

Abadía Plaimpied y la cripta

Abbey Plaimpied e la cripta

Abbey Plaimpied i krypta

 
 
 
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28 août 2009 5 28 /08 /août /2009 09:33



Les amateurs d’art roman de passage à Bourges sauront retrouver l’emplacement de ce discret et ultime vestige de la collégiale Saint-Ursin, détruite à l’époque moderne. Le portail central de l’église, déposé au moment de sa destruction, a été remonté dans le mur d’enceinte de l’ancien couvent de l’Annonciade, tout proche de la Maison de la Culture. Son ornementation très particulière permet, entre autres, de découvrir un intéressant calendrier illustré de scènes de la vie agricole.

 

De février à janvier, le sculpteur s’est appliqué, selon les habitudes du temps, à représenter les activités principales du monde rural, parmi lesquelles la taille de la vigne, les moissons, les vendanges et l' abattage de porc. La finesse du trait et le soin mis par l’artiste pour exécuter l’ensemble du panneau -qui comprend aussi des scènes de fabliaux et une chasse à courre- font de ce portail une œuvre majeure de l’art roman berrichon.

Un détail tout à fait remarquable est à signaler: le travail a été signé par son auteur. Sous la frise du calendrier est bien visible l’inscription:

“Girauldus fecit istas portas” (Giraud a réalisé ces portes)

 

qui permet de déduire que le portail conservé était probablement l’élément central d’une composition à trois éléments, les deux ouvertures latérales étant perdues. Cette signature est en elle-même une curiosité anthroponymique car le nom Girauldus est unique en son genre dans l’ensemble de la documentation médiévale régionale. Le nom Giraud, assez fréquent dans les chartes contemporaines toutes catégories sociales confondues, est en général décliné sous les formes latines Giraldus et Giraudus (variantes en Geraudus/Geraldus) mais le nom Girauldus gravé sur le tympan de Saint-Ursin de Bourges est à cette heure un cas unique pour la région, ce qui pourrait laisser entendre que la commande des chanoines a pu être exécutée par un tailleur de pierre étranger à la région.



 

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9 août 2009 7 09 /08 /août /2009 09:35



La grande église romane de la Celle-Bruère, dans le sud du département du Cher, recèle, scellés dans sa façade, trois étranges tableaux de pierre historiés dont l'origine intrigue depuis des décennies les amateurs d'art médiéval. Un animal assez fin, peut-être un veau, une patte posée sur un globe, apparaît aux cotés de deux scènes représentant des hommes affrontés, disposées de chaque coté de l'entrée du sanctuaire. Si la recherche de symétrie est évidente, tant dans l'espace que dans le thème, on remarque d'importantes différences dans la maîtrise de la sculpture, le tableau de gauche étant beaucoup plus contrasté et détaillé que son jumeau à la droite de la porte. Sur l'une et l'autre scène se distingue l'inscription "Frotoardus".

 

Manifestement, ces trois éléments, complétés par une tête de statue zoomorphe disposée en saillie sur la façade, ne sont pas romans et leur inclusion dans la maçonnerie est indatable. Soit ces sculptures ont été ajoutées au bâtiment lors de sa construction, soit leur ajout est postérieur, mais leur caractère intrusif est indéniable. 

 

Les spécialistes locaux hésitent depuis longtemps devant le caractère déroutant du tableau de gauche. Deux personnages, aux traits soulignés, vêtus de tuniques serrées à la taille et tombant jusqu'à mi-cuisses et coiffés de calottes, semblent s'affronter. L'un foule un objet qui évoque une lampe à huile ou une gourde, l'autre domine un petit animal en cage, chien ou renard. Entre les deux est gravé le nom latin FROTOARDUS. 

Cet ornement est atypique au point qu'il en reste inclassable. Le trait échappe à la plastique romane, mais n'est pas plus ressemblant aux styles antiques ou paléo-médiévaux, ce qui renforce son caractère insolite sur un monument aussi équilibré que l'église de la Celle. La présence à faible distance du site antique d'Allichamps a même permis à certains de voir dans les sculptures de la façade de la Celle des réemplois d'ornements antiques prélevés sur un ancien temple païen, à l'image de plusieurs éléments d'autels funéraires inclus dans les maçonneries extérieures et intérieures de l'église.

Arrêtons nous un instant sur un élément qui, loin de dissiper l'opacité de l'origine de ces sculptures, évoque résolument l'Antiquité tardive ou le haut Moyen-âge: la mention épigraphique Frotoardus.

Remarquons d'emblée que les lettres se ressemblent sur les deux tableaux, et que le style d'écriture n'est pas roman. Les pierres sont donc antérieures ou postérieures au XIIe siècle, période de la construction de la plupart des édifices religieux, séculiers ou réguliers, du secteur. Frotoardus est manifestement un nom propre masculin à un élément, latinisation d'un patronyme germanique comme on en voit apparaître sur le sol gaulois à partir des invasions des peuples d'outre-Rhin, à la fin de l'Empire Romain. Le dépouillement des chartes les plus anciennes régionales montre que ce genre de nom reste employé localement jusqu'au XIe siècle, période à laquelle il décline pour être définitivement abandonné à la fin du XIIe siècle pour laisser place à des dénominations à deux éléments, du type nom+surnom (Adalard Guillebaud ou Mathilde de Charenton, pour prendre des exemples de ce blog).

Si un personnage nommé Frotoardus a bien existé, c'est dans un espace chronologique de presque un demi-millénaire, sur lequel nous ne disposons presque d'aucune source narrative et il n'est recoupé par aucune autre source.

Autre problème: quel est le statut de ce nom? Certain y ont vu la signature du sculpteur, ce qui semble étonnant car on note des différences de styles marquées entre les trois œuvres: très dépouillées pour la scène de combat et le veau au globe à droite de la porte, presque caricatural à gauche de l'ouverture. De plus, il est de coutume que dans le cas de signatures épigraphiques, l'auteur soit nommé dans une courte phrase du style: Giraldus fecit (Gerald (l')a fait) ou: Giraldus fecit hanc portam  (gerald a fait ce portail) comme on peut en lire un exemple sur le fronton du portail de Saint-Ursin, à Bourges. Cet argument nous éloigne encore un peu plus de l'époque romane.

Reste l'hypothèse d'un nom désignant l'un des combattants figuré sur les scène de pugilat sans qu'on puisse en aucun cas savoir quel est la finalité de ces sculptures. Evoquer le souvenir d'un exploit guerrier, Frotoardus étant l'un des lutteurs et peut-être le commanditaire de ces œuvres? Rappeler le martyr d'un saint local selon une tradition à jamais oubliée? Ceci signifierait un réemploi à partir d'un ouvrage religieux plus ancien, chapelle, tombeau ou reliquaire. Illustrer une tradition orale laïque, fable, comptine ou légende désormais effacée de la mémoire collective? Mais alors, sur quel type d'ouvrage aurait-on pris le soin de sculpter ces pierres?

L'énigme reste entière.

Personnellement, je n'écarterai pas l'hypothèse d'un transfert de reliques d'une chapelle primitive vers le sanctuaire de la Celle. Tout reste à savoir quand aurait pu avoir lieu une telle translation. Au moment de la construction de l'église, ce qui semblerait cohérent avec l'épigraphie et l'anthroponymie, mais qui ne règle pas la question du style inclassable de la sculpture de gauche ou beaucoup plus récemment, le travail ayant pu être confié à un tailleur de pierre des carrières de la Celle, ce qui aurait le mérite d'expliquer le style hors norme et très naïf de la scène figurée?

Comme le lecteur peut s'en rendre compte, les lutteurs de la Celle ne sont pas prêts de cesser de bousculer l'imagination des visiteurs de ce très bel endroit.

 
 

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Dans l'objectif de partager avec le grand public une partie du contenu de mes recherches, je propose des animations autour du Moyen-âge et de l'Antiquité sous forme de conférences d'environ 1h30. Ces interventions s'adressent à des auditeurs curieux de l'histoire de leur région et sont accessibles sans formation universitaire ou savante préalable.
Fidèle aux principes de la laïcité, j'ai été accueilli par des associations, comités des fêtes et d'entreprise, mairies, pour des conférences publiques ou privées sur des sujets tels que:
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Pour compléter votre information sur le petit patrimoine berrichon, je vous recommande "le livre de Meslon",  Blog dédié à un lieu-dit d'une richesse assez exceptionnelle. Toute la diversité d'un terroir presque anonyme.
A retrouver dans la rubrique "liens": archéologie et histoire d'un lieu-dit

L'âne du Berry


Présent sur le sol berrichon depuis un millénaire, l'âne méritait qu'un blog soit consacré à son histoire et à son élevage. Retrouvez le à l'adresse suivante:

Histoire et cartes postales anciennes

paysan-ruthène

 

Cartes postales, photos anciennes ou plus modernes pour illustrer l'Histoire des terroirs:

 

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Le rédacteur de ce blog s'oppose résolument aux projets d'implantation d'éoliennes industrielles dans le paysage berrichon.
Argumentaire à retrouver sur le lien suivant:
le livre de Meslon: non à l'éolien industriel 

contacts avec l'auteur


J'observe depuis quelques mois la fâcheuse tendance qu'ont certains visiteurs à me contacter directement pour me poser des questions très précises, et à disparaître ensuite sans même un mot de remerciement. Désormais, ces demandes ne recevront plus de réponse privée. Ce blog est conçu pour apporter à un maximum de public des informations sur le Berry aux temps médiévaux. je prierai donc les personnes souhaitant disposer de renseignements sur le patrimoine ou l'histoire régionale à passer par la rubrique "commentaires" accessible au bas de chaque article, afin que tous puissent profiter des questions et des réponses.
Les demandes de renseignements sur mes activités annexes (conférences, contacts avec la presse, vente d'ânes Grand Noir du Berry...) seront donc les seules auxquelles je répondrai en privé.
Je profite de cette correction pour signaler qu'à l'exception des reproductions d'anciennes cartes postales, tombées dans le domaine public ou de quelques logos empruntés pour remercier certains médias de leur intérêt pour mes recherches, toutes les photos illustrant pages et articles ont été prises et retravaillées par mes soins et que tout emprunt pour illustrer un site ou un blog devra être au préalable justifié par une demande écrite.