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7 novembre 2020 6 07 /11 /novembre /2020 15:00

 

Il subsiste, dans la commune creusoise de Leyrat, un intéressant vestige du premier âge féodal. Visible partiellement de la route et surtout observable sur photos satellites, le site castral de la Motte-au-Groing fut, indubitablement, le lieu de résidence d’une des plus anciennes familles chevaleresques du Berry du Sud et du Nord-Est de la Marche.

Nous retrouvons des mentions de ses seigneurs depuis le dernier tiers du XIIIe siècle, période à laquelle un certain Pierre le Groing (Gront, ou lo Gron, dans la langue de l’époque) participa à la refondation du prieuré bénédictin de la Chapelaude, dans l’Allier. Ses descendants s’intéressèrent aussi au sort des abbayes cisterciennes de Bonlieu et des Pierres.

Un autre Pierre le Groing apparaît, bien plus tard, comme exécuteur testamentaire du Seigneur d’Huriel Louis de Brosse, tué à la bataille de Poitiers. Les le Groing portent alors les titres de chevalier ou seigneur. Au début du XVIe siècle, l’un d’eux est qualifié de vicomte.

Si cette famille est bien restée sur place pendant un demi-millénaire, il est évident que le centre de leur pouvoir a connu des modifications qui peuvent expliquer une certaine confusion sur l’interprétation des données archéologiques présentement accessibles.

Nous observons sur place une grande élévation circulaire encore en grande partie entourée de fossés en eau. Cette motte, qu’on peut qualifier de féodale (le terme de seigneur est attesté en 1249 et 1263) est d’une très faible hauteur, sans commune mesure avec les importants terrassements de celles de Saint-Désiré ou d’Epineuil-le-Fleuriel.

 

Au nord, le cadastre napoléonien révèle une deuxième enceinte fossoyée contigüe à la motte, également entourée d’eau, mais surtout beaucoup plus vaste.

Il me semble qu’on doit reconnaître là non pas une seconde motte (la forme singulier du toponyme : la Motte, ne plaide pas en faveur d’une construction gémellaire) mais plutôt d’une première basse-cour. 

 

 

L’examen du parcellaire existant permet de constater au Nord-Nord-Est des parcelles citées un ensemble de haies et de chemins formant un tracé vaguement circulaire ressemblant beaucoup aux restes d’une seconde basse-cour, beaucoup plus étendue.

 

 

Un schéma se dessine. A l’origine, existaient une motte servant de base à un château de bois, et une basse-cour. Cette a peut-être été arasée pour permettre de construire un donjon de pierre (cette évolution, dans la région, permet aux féodaux de se faire reconnaître comme seigneurs). Il est aussi possible que la vieille motte ait été conservée comme symbole de l’ancienneté du pouvoir de la famille le Groing, et que le château de pierre se soit construit dans l’espace, assez vaste, de la première basse-cour. Un autre château, plus dans le goût du temps, a pu venir remplacer la forteresse féodale à la Renaissance. Le linteau armorié serait un de ses restes.

Le temps a effacé les vestiges de pierre pour ne conserver que les fossés primitifs, utiles comme viviers ou pour faire boire les animaux.

Le site complet de la Motte-au-Groing mériterait une investigation archéologique pour rendre son passé plus lisible.

 

Le lecteur notera que la motte à laquelle est consacré ce billet est une propriété privée et que son approche est soumise au strict respect de la Loi.

 

© Olivier Trotignon 2020

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3 octobre 2020 6 03 /10 /octobre /2020 19:42

 

J'ai le plaisir de vous convier à assister à ma prochaine conférence:

 reliques, miracles et pèlerinages en Berry au Moyen-Âge

qui se tiendra à la salle des fêtes de Coust (18) le dimanche 18 octobre à partir de 17h, à l'initiative de l'association Coust, notre village, qui m'avait déjà invité à animer les Journées du Patrimoine en 2017 et 2019.

Cette conférence dépassera le cadre chronologique habituel de mes recherches pour s'intéresser à un pèlerinage populaire et à des cas de miracles autour du prieuré d'Orsan au XVIIe siècle, sous une forme inédite.

Je rappelle que, comme à chacune de mes animations, aucune connaissance en histoire médiévale ou moderne n'est requise, et que la présentation des situations historiques respectera strictement les règles de la laïcité.

L'entrée est libre et gratuite. Une corbeille sera mise à votre disposition à la sortie pour recueillir des dons destinés à la rénovation de l'église du village, qui progresse. Quelques détails pratiques: durée de mon intervention: environ 1h30; parking sur place; accès aménagé pour les personnes à mobilité réduite. Pour assurer la sécurité de tous, pensez à vous munir d'un masque. Les places seront espacées selon le protocole sanitaire en vigueur.

Merci à la municipalité de Coust et à son maire, m. Pascal Collin, pour son soutien et son aide logistique.

Au plaisir de vous rencontrer ou vous retrouver, enfin! le 18. N'hésitez pas à faire circuler l'information sur vos propres réseaux.

© Olivier Trotignon 2020

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22 septembre 2020 2 22 /09 /septembre /2020 13:42

 

Les journées du Patrimoine 2020 ont été l'occasion de pouvoir visiter le très intéressant château de la Motte-Feuilly, dans le sud du département de l'Indre. Cette petite forteresse est composée de bâtiments élevés à la Guerre de cent ans et remaniés à la Renaissance ainsi qu'à des périodes beaucoup plus récentes. La motte castrale éponyme, si elle était bien à l'emplacement de l'actuelle enceinte, n'a laissé aucune trace. Outre la présence de fossés humides sur le site - l'eau était recherchée pour assurer la sécurité des châteaux primitifs en bois -un élément végétal remarquable pourrait bien être, de manière assez paradoxale, le dernier vestige de la première occupation militaire du lieu.

Poussant à quelques dizaines de mètres du rempart, en légère surélévation par rapport à l'assise de la Motte-Feuilly se trouve un énorme if que les botanistes reconnaissent comme pouvant être millénaire, donc contemporain des premières mottes castrales. 

Cette essence n'est pas indigène. L'arbre n'a pu survivre dans un paysage agricole qu'avec l'aide l'homme: ses baies et ses feuilles, toxiques pour les herbivores, le condamnant à l'éradication par les cultivateurs du cru. Chacun connait, en revanche, l'intérêt que le bois d'if suscitait auprès des militaires médiévaux. Souple et résistant à la torsion, ses qualités pour l'archerie étaient sans égales. Il n'y a donc rien d'extravagant à admettre que cet arbre à pu être planté avant le début des croisades par des hommes d'armes prévoyants.

 

 

© O. Trotignon 2020

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24 août 2020 1 24 /08 /août /2020 08:58

 

Il m'est arrivé quelquefois, au cours de mes recherches, de remarquer l'existence de pièces d'archives sans rapport direct avec mon projet, mais qui pouvaient éclairer l'histoire de ma région sous des angles inattendus.

Ainsi, il y a plusieurs années, consultant aux Archives départementales du Cher des copies d'actes médiévaux réalisées sous l'Ancien régime, mon attention a été attirée par des procès verbaux de témoignages, souvent d'essence populaire, rapportant des faits miraculeux liés à la présence, dans le petit prieuré fontevriste d'Orsan, dans le Sud du Cher, d'une relique très particulière: le cœur du moine médiéval Robert d'Arbrissel, fondateur de l'ordre de Fontevraud, décédé dans ce petit monastère au début du XIIe siècle.

Même si les faits outrepassent largement le cadre chronologique de mes études, j'ai proposé une synthèse de mes observations au Colloque de Paray-le-Monial qui a choisi comme thème pour l'année 2020 "Reliques et pèlerinages".

Vous trouverez l'article sur le lien suivant:

 

https://carnetparay.hypotheses.org/1088

 

sous le titre "Pèlerinage et dévotion populaire en Berry du Sud au lendemain des guerres de Religion: les miracles de Monsieur Saint-Cœur".

 

Une partie des informations dont je me suis servi pour développer mes arguments serviront pour ma prochaine conférence, prévue à Coust pour le mois d'octobre.

Bonne lecture!

 

© Olivier Trotignon 2020

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28 juin 2020 7 28 /06 /juin /2020 13:19

 

C’est une très intéressante découverte qui a été faite en novembre 2014 à Urçay, dans le département de l’Allier, par une équipe d’archéologues de l’INRAP Auvergne dirigée par m. Philippe Arnaud. Dans un niveau profond proche des fondations de l’église du village a été trouvé une rare obole du roi Lothaire (954-986). Cette petite pièce d’argent, apparemment en assez bon état pèse moins d’un gramme pour un diamètre de 17 mm et a été frappée à Bourges, comme l’indique son revers où est apparent le mot « Biturici ».

Il est impossible de connaître sa date d’émission ni, à fortiori, celle à laquelle elle a été perdue ou abandonnée dans le sous-sol du village d’Urçay mais l’essentiel n’est pas là. Cette monnaie, ainsi que la manière de construire les fondations du sanctuaire du village, prouvent une activité humaine antérieure à l’an 1000 dans un secteur de la vallée du Cher sur lequel nous n’avons aucune documentation historique. La prétendue dépendance de l’église vis à vis de l’abbaye Saint-Cyr de Nevers repose sur une homonymie : le « Urziaco », noté en 888 dans la charte 34 du cartulaire de la dite abbaye, est à identifier avec la paroisse d’Urzy, proche de la cité nivernaise. 

Dans le désert documentaire qui caractérise une grande partie du Berry du Sud avant la période féodale, l’archéologie est la seule ressource dont l’historien puisse se servir pour tenter une ébauche de carte de la présence humaine au cours de cette longue période qui va de la fin de l’Empire romain à l’édification des premiers châteaux de terre et de bois. Dans le cas présent, le sondage des professionnels de l’INRAP prouve l’existence d’une église antérieure à la période romane dans le bourg d’Urçay. Un niveau de sarcophage a été aussi révélé. 

Que conclure à partir de ces informations ? 

Trop peu de sites ont été fouillés de manière méthodique dans cette portion de la vallée du Cher pour tenter une approche raisonnée de l’occupation des sols à la période pré-féodale. Une constante cependant : la matière composant les sarcophages d’Urçay et de Drevant (à quelques kilomètres en aval) n’est pas locale. Les lourdes cuves de pierre ayant servi de tombeaux ont certainement circulé sur les eaux du Cher. Urçay n’est sur aucune route ancienne importante : la voie antique Bourges/Néris passe sur l’autre rive de la rivière. Il semblerait que le Cher, aujourd’hui impraticable pour la batellerie, ait favorisé la circulation des hommes et des biens dans ces périodes très anciennes. On ne peut que se réjouir des prospections subaquatiques qui auscultent ses eaux et qui pourraient, dans l’avenir, fournir de très intéressantes observations.

 

Note : l’image qui illustre ce billet est celle d’une monnaie identique à celle trouvée par les fouilleurs, proposée à la vente sur un site marchand.

 

 

© Olivier Trotignon 2020

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27 mai 2020 3 27 /05 /mai /2020 10:20

 

Il m’est arrivé plusieurs fois de me servir de vieilles photographies pour étayer certains billets de ce blog. Contrairement à notre époque héritière d’un exode rural massif et de la disparition de nombre d’activités informelles dans le monde rural, le moment où les photographes qui ont installé leurs trépieds pour saisir sur la plaque de leur appareil l’image de ce qui les entourait était encore celui des animaux de ferme qu’on menait brouter toute la végétation à leur portée. Ainsi, moutons, vaches, chèvres, ânes entretenaient des lieux aujourd’hui envahis par des bois et des broussailles.

J’ai choisi d’exploiter aujourd’hui cette très intéressante carte postale de la motte castrale élevée dans le bourg d’Épineuil-le-Fleuriel, à laquelle j’avais consacré un article et une conférence il y a quelques années.

Cette motte est un patrimoine connu et protégé, que rien ne menace. L’équipe municipale que j’avais rencontré sur place connaît parfaitement la valeur historique et archéologique de ce vestige. Le seul handicap dont souffre cet endroit est la couverture végétale qui le recouvre, et qui rend difficile la lecture du site, même pour des visiteurs habitués à ces restes de châteaux primitifs.

L’ancienne carte postale de la motte offre une vue très nette de l’ensemble. La vague impression de dôme donnée par les cimes de l’actuel bosquet est trompeuse : le tertre défensif est surmonté d’une plate-forme qui servait de socle au donjon primitif. On remarque la forte pente de l’ouvrage et le reste de fossé qui assuraient une partie de la défense du château de bois.

Je ne saurai que vous recommander, si vous passez en vallée du Cher, de faire un détour par Épineuil. Outre ce vestige médiéval et l’école du Grand-Meaulnes, le pont-canal et le hameau éclusier qui le borde méritent d’être découverts.

 

 

© Olivier Trotignon 2020

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29 avril 2020 3 29 /04 /avril /2020 22:34

 

L’activité d’historien médiéviste conduit parfois à la découverte de curieuses anecdotes bien au-delà des cadres de recherche qu’on s’est fixés, et en voici une, justement, qui a particulièrement retenu mon attention. Les temps actuels étant à la morosité, je sors pour un instant du thème habituel de cet espace pour vous conter la belle histoire de monsieur P.

Monsieur P. était originaire de la petite ville berrichonne de Dun-sur-Auron et suivait des études à Paris. Comme beaucoup d’étudiants, m. P. faisait attention à son budget, ce qui ne l’empêchait pas de fréquenter une petite officine spécialisée dans le commerce de vieux papiers, en particulier des lettres autographiées, auxquelles il accordait beaucoup d’intérêt.

Un jour, c’est un lot assez atypique qui éveilla son attention. Une personne avait déposé et mis en vente un carton contenant plusieurs actes médiévaux issus du chartrier de l’abbaye cistercienne de Loroy, dans le département du Cher. Hélas, le prix demandé par le vendeur dépassait de très loin les moyens de m. P., qui dût se résoudre à abandonner tout espoir d’acquérir ces rares pièces d’archives.

Quelques temps après, rentrant en Berry par le train, l’étudiant berrichon eut besoin de monnaie. S’adressant à un commerçant de la gare d’Austerlitz, celui-ci refusa de le dépanner et l’envoya à un guichet de loterie. Monsieur P. acheta un billet de la dite loterie, empocha sa monnaie et sauta à l’heure dans son train. Bien plus tard, revenant à Paris, m. P. retrouva le billet, dont il avait oublié l’existence, dans la poche de son manteau. Par curiosité, il repassa par le kiosque comparer les numéros et là, sa surprise fut à la hauteur de l’improbabilité de l’évènement : le modeste ticket auquel il n’avait prêté aucun intérêt pendant son séjour à Dun était non seulement gagnant, mais était LE billet gagnant du tirage au sort. Notre étudiant se retrouva bientôt avec une somme confortable en poche et se souvint de cette liasse de parchemins convoitée quelque semaines plus tôt chez son bouquiniste. La chance était décidément de son coté. Les actes médiévaux n’avaient pas trouvé preneur et m. P. put faire l’acquisition du lot dans sa totalité.

Des années plus tard, l’ancien étudiant, considérant cette partie de sa collection, eut la généreuse initiative d’en faire don aux Archives départementales du Cher, joignant à ce geste une très jolie lettre racontant par le détail son lien avec ces textes, lettre que j’ai pris la liberté de résumer dans ce billet.

Ces actes, au nombre de huit, la plupart en latin, n’ont bien entendu pas révolutionné nos connaissances sur le monastère de Loroy, mais leur retour vers les collections publiques doit être salué, autant pour le geste de son auteur que pour l’exemple qu’il donne. 

 

© O. Trotignon 2020

 

 

 

 

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18 avril 2020 6 18 /04 /avril /2020 22:16

 

Une expression populaire trouve probablement son origine dans l’histoire du Berry du Sud, ou plus précisément du Bourbonnais, si on est attentif à la chronologie. Le terme « mouron » est l’homonyme du nom d’une plante sauvage qui prospère dans certains potagers. Elle était redoutée par les cuniculiculteurs car réputée être un poison pour les lapins de clapier, qu’on nourrissait de toutes sortes d’herbes glanées dans les jardins. Pour certains, c’est dans cette menace que se trouve l’origine étymologique du mouron, synonyme de menace, de danger sournois.

Une autre piste avait été proposée par un de mes vieux professeurs d’archéologie qui développait une thèse curieuse. Rompu à tout ce qui concernait l’histoire de la vallée du Cher, il affirmait que la plante n’y était pour rien dans l’affaire, mais qu’il fallait aller chercher dans un épisode tourmenté de cette partie de l’ancien Bourbonnais : le siège de la forteresse médiévale de Montrond (1751-1752).

Il est vrai que cette guerre locale vit s’affronter une garnison défendant la très belle et puissante place de Montrond et une armée de siège diligentée par la monarchie, l’objectif étant de réduire cette grande citadelle appartenant au prince de Condé, meneur de la Fronde. Servie par une forte artillerie et des arsenaux bien garnis, la troupe défendant le château parvint à tenir près de onze mois avant de capituler, vaincue par la faim. La durée du siège n’ayant pas tardé à inquiéter les capitaines aux ordres de Louis XIV, ceux-ci auraient commencé à « se faire du Montrond », devenu, à force d’embuches linguistiques, à « se faire du mouron » sur l’issue incertaine de leur entreprise.

La solution est peut-être encore plus simple que le pensait mon regretté maître. En effet, se trouve aux Archives départementales du Cher des comptes de l’abbaye de Noirlac, monastère cistercien proche de Saint-Amand et donc de Montrond. Dans un inventaire de 1724 se trouve la formule suivante : « rente de mouron », en référence à des droits perçus par les religieux sur les seigneuries d’Orval et de Montrond. Cette orthographe légèrement postérieure au siège accréditerait l’origine locale de cette vieille expression.

 

 

© Olivier Trotignon 2020

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5 avril 2020 7 05 /04 /avril /2020 20:30

 

En septembre 2019, le musée de Cluny a prêté pour un an au musée de l’hospice Saint-Roch d’Issoudun, dans l’Indre deux pièces extraites de ses riches collections. Il s’agit d’un ensemble exceptionnel de deux châsses ayant appartenu jusqu’à la Révolution à la grande abbaye cistercienne de la Prée, dans la vallée de l’Arnon. Ces deux reliquaires contenaient les restes aujourd’hui disparus de sainte Fauste, sainte fort peu connue dans la région. Produits par les ateliers limousins qui excellaient en matière d’émaillage sur âme de cuivre, ces objets comptent parmi les plus beaux témoignages de cet art si particulier encore visibles dans les collections publiques nationales.

Exposées côte-à-côte dans un coffre transparent éclairé avec beaucoup de justesse, ces châsses se découvrent sous presque tous les angles, et bénéficient d’un guide très complet offert aux visiteurs qui donne une foule de détails sur leur parcours et l’identité des deux saints dont elles accueillaient les ossements.

 

Il n’est bien entendu pas question pour moi de piller ce document. J’attirerai en revanche votre attention sur une observation personnelle qui vient compléter plusieurs constatations faites au cours de mes recherches sur les abbayes berrichonnes, cisterciennes ou non.

 

Ces reliquaires, pourtant authentiques et clairement identifiés, ne cadrent pas avec l’image encore trop souvent promue d’un ordre cistercien détaché de toutes contingences iconographiques. On trouve encore affirmé le dogme d’un ordre religieux voué à la pauvreté, rejetant les couleurs et les images comme distrayantes de la prière et fermé sur lui même. Cette thèse peut-elle être encore soutenue lorsqu’on observe la présence de ces châsses dans le patrimoine de la Prée ? Dès la fin du XIIe siècle, les premiers gisants, dont certains féminins, font leur apparition dans la nef de Noirlac, puis à Fontmorigny, Loroy et probablement au Landais et aux Pierres. A la fin du Moyen-âge, Fontmorigny et Loroy sont des lieux de pèlerinages pour les populations locales.

Ceci signifie t-il que les Cisterciens berrichons ont été une entité déviante ? Nullement, juste que ces religieux ont évolué avec leur temps, et ne sont pas restés figés dans une posture de manuel scolaire.

 

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22 mars 2020 7 22 /03 /mars /2020 09:46

 

L’étude des textes antérieurs à la période féodale conservés dans les cartulaires berrichons révèle, en matière d’anthroponymie, plusieurs habitudes des populations locales.

La règle la plus commune est l’attribution aux individus d’un nom à un seul élément. Des vicomtes de Bourges aux paysans les plus humbles des campagnes du Berry, tout le monde, hommes et femmes, est identifié par un nom sans précision de lieu ni de lien familial. Seul les clercs conservent parfois leur titre, comme celui d’abbé.

Cette coutume, observée dans de nombreuses régions françaises, a eu pour conséquence d’obliger les parents à trouver des formules pour éviter à leur descendance des problèmes d’homonymie. Deux choix s’offraient à eux :

- puiser dans un répertoire antique, ancien et nouveau Testaments compris ; ou

- s’inspirer des traditions contemporaines.

Pour se référer à des textes, il faut être capable de s’en procurer et de savoir les lire, apanage d’une minorité de lettrés. Ceci explique peut-être la faible part de noms à consonance latine ou biblique constatés dans les textes (Vigilius,Damianus, Lazarus, Apollonius, Salomon…).

A une majorité écrasante, les noms contemporains et postérieurs à la période carolingienne sont composés de deux radicaux d’essence germanique réunis pour former une expression à connotation valeureuse ou guerrière, selon un principe familier aux linguistes, et qui semble avoir été la norme bien longtemps après la fin des invasions. Il n’est par contre pas du tout sûr que la valeur totémique de certains de ces noms ait eu encore un sens au moment où ils ont été employés. Rien ne prouve qu’un villageois nommant son fils Bernard ait pensé à un ours fort en le faisant baptiser.

J’ai choisi de vous présenter une liste d’anthroponymes construits autour de la racine Berht « brillant, illustre » relevés au hasard de la documentation.

 

De 800 à 850 :  Alivertus, Azibertus, Cunebertus, Garibertus, Gerbertus, Vibertus, Vygobertus ;

de 850 à 900 : Egembertus,Godebertus ;

de 900 à 950 : Agelbertus, Gislebertus,  Guitbertus ;

de 950 à 1000 : Tetbertus, Teobertus,Umbertus, Unibertus.

 

Le premier âge féodal ajoute de nouveaux noms à la liste :

XIe siècle :  Ambertus, Aldebertus, Ermenbertus,  Ragimbertus/Raginbertus, Winebertus ;

XIIe siècle : Haimbertus, Arembertus, Guinebertus, Gumbertus, Jobertus/Josbertus, Nacbertus, Obertus, Odevertus,Oldebertus, Raimberdus, Uldevert,Wibertus ;

un seul patronyme,  Ildebertusest identifié au XIIIe siècle. Petit à petit, les noms romans se multiplient, et des formes nominales comme Pierre, Jean, Etienne ou Guillaume occupent de plus en plus de place dans les choix familiaux.

© Olivier.Trotignon 2020

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Dans l'objectif de partager avec le grand public une partie du contenu de mes recherches, je propose des animations autour du Moyen-âge et de l'Antiquité sous forme de conférences d'environ 1h30. Ces interventions s'adressent à des auditeurs curieux de l'histoire de leur région et sont accessibles sans formation universitaire ou savante préalable.
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Pour compléter votre information sur le petit patrimoine berrichon, je vous recommande "le livre de Meslon",  Blog dédié à un lieu-dit d'une richesse assez exceptionnelle. Toute la diversité d'un terroir presque anonyme.
A retrouver dans la rubrique "liens": archéologie et histoire d'un lieu-dit

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Présent sur le sol berrichon depuis un millénaire, l'âne méritait qu'un blog soit consacré à son histoire et à son élevage. Retrouvez le à l'adresse suivante:

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J'observe depuis quelques mois la fâcheuse tendance qu'ont certains visiteurs à me contacter directement pour me poser des questions très précises, et à disparaître ensuite sans même un mot de remerciement. Désormais, ces demandes ne recevront plus de réponse privée. Ce blog est conçu pour apporter à un maximum de public des informations sur le Berry aux temps médiévaux. je prierai donc les personnes souhaitant disposer de renseignements sur le patrimoine ou l'histoire régionale à passer par la rubrique "commentaires" accessible au bas de chaque article, afin que tous puissent profiter des questions et des réponses.
Les demandes de renseignements sur mes activités annexes (conférences, contacts avec la presse, vente d'ânes Grand Noir du Berry...) seront donc les seules auxquelles je répondrai en privé.
Je profite de cette correction pour signaler qu'à l'exception des reproductions d'anciennes cartes postales, tombées dans le domaine public ou de quelques logos empruntés pour remercier certains médias de leur intérêt pour mes recherches, toutes les photos illustrant pages et articles ont été prises et retravaillées par mes soins et que tout emprunt pour illustrer un site ou un blog devra être au préalable justifié par une demande écrite.