Une succession de rencontres et de témoignages ont attiré ces dernières semaines mon attention vers la pratique de la détection métallique, au point qu'il me parait utile de clarifier mon point de vue sur cette pratique, au risque de me faire des inimitiés dans les deux camps, celui des prospecteurs clandestins et celui des archéologues de métier.
Disons le clairement: le petit monde de la prospection régionale n'apprécie pas mes prises de position. Un de mes correspondants m'a signalé des commentaires me concernant directement sur un forum. Rien d'insultant ni de diffamatoire, mais rien de bienveillant non plus dans les propos que j'ai lus de gens qui se dissimulent derrière des pseudonymes pour parler de quelqu'un qui écrit sous sa véritable identité.
Qu'ils sachent que mon manque d'appétit pour leur passion s'appuie sur des souvenirs personnels précis et désagréables. Dans les années 80, j'ai échappé de justesse à une correction en règle par quatre de leurs semblables, allure commando, qui pillaient un site proche de Bruère-Allichamps en pleine journée. Quatre contre un, ces gros bras ne risquaient pas grand chose; j'ai pu me dégager grâce à une intervention extérieure, heureusement.
Il y a quelques années, j'ai vu arriver chez moi un prospecteur qui ignorait qui j'étais, et qui m'a fait un numéro digne d'une école de clown pour obtenir le droit de venir détecter sur mon terrain. Je déteste être pris pour un imbécile, même par un imbécile, et la prospection métallique, c'est aussi des gens comme ça. C'est d'ailleurs à leur intention que je dissimule toutes les localisations de sites sensibles sur lesquels je travaille, leur présence sur mes blogs n'ayant pour but que de trouver de nouveaux lieux à piller. L'historique des recherches fourni quotidiennement par la plate-forme Overblog ne laisse aucun doute à ce sujet.
Et puis il y a tous les autres -j'espère qu'ils représentent la majorité- qui pratiquent un loisir illégal en toute connaissance de cause mais qui souffrent d'être réduits à la clandestinité par une législation trop rigoureuse à leur yeux. Leur frustration est de ne rien pouvoir apporter de constructif à l'histoire de leur terroir, et pour cause: j'ai raconté dans un billet précédent ce qui pouvait arriver si la Gendarmerie entrait en action. Fouille au corps, saisie des détecteurs, perquisition au domicile, saisie de tous les objets anciens, convocation à s'expliquer devant un juge et, je l'ai appris il y a peu, saisie du véhicule. On comprend que certains préfèrent s'abstenir de signer sous leur propre nom.
Qu'ils soient certains que dans le camp adverse, celui de l'archéologie officielle, il y a aussi des gens pas spécialement recommandables. J'ai d'excellents rapports avec des archéologues professionnels et amateurs qui sont des gens droits et rigoureux, avec lesquels l'information circule dans les deux sens. La mise en commun de nos savoir-faire respectifs contribue à enrichir la connaissance que le public a de l'histoire régionale, et j'espère bien poursuivre ma coopération avec certaines équipes le plus longtemps possible. Mais il y a aussi des archéologues intellectuellement malhonnêtes, des gens qui vous font plein de promesses pour vous soutirer des informations (j'ai cru des années avoir été inscrit sur la liste des candidats à une visite de la vraie grotte de Lascaux), à qui on confie des objets anciens et qui vous oublient ensuite, qui publient à leur nom des sites qu'ils n'ont pas découverts...évitons donc tout manichéisme. Il n'y a pas d'un coté les méchants et de l'autre les gentils. Ça, ce sont des contes pour enfants.
Pour les adultes, je propose une expérience. Je suis prêt à mettre en ligne sur ce blog des photos et cotes d'objets médiévaux trouvés en détection, sous réserve qu'ils aient un caractère exceptionnel: deniers rares, objets de culte, matrices de sceaux... que des prospecteurs aimeraient voir publiés sur un espace ouvert, sans mot de passe comme sur les forums de détection ou de numismatique, et accessible à un vaste public amateur d'art et d'histoire de la période médiévale.
Je suis disposé à reproduire de très bonnes photos ou scans, qu'on peut m'envoyer de manière anonyme (un prénom me suffira) à mon adresse dédiée:
berrymedieval#yahoo.fr (le # remplace le @, pour éviter les robots générateurs de spams).
Une présentation résumée des conditions de découverte m'aidera à écrire le billet, de même qu'une localisation minimum.
J'espère que ces lignes apporteront la preuve à beaucoup de prospecteurs de l'ombre que je ne les considère pas comme des parias, comme certains paramilitaires abrutis qu'on croise parfois en forêt ou sur les plages, et que je serais ravi de pouvoir leur réserver un espace pour partager leurs plus belles trouvailles, dans l'intérêt de tous.
© Olivier Trotignon 2013